Le premier plan, aérien, est somptueux. On découvre un train, suspendu, traversant un fleuve presque au ralenti pour s’engouffrer dans un pan de forêt, semblant presque y disparaître. À l’intérieur ? Des réfugiés américains espèrent rejoindre Vancouver pour ensuite rallier Hawaï, et la liberté. Parmi eux, June Osborne (Elisabeth Moss) et Serena Joy Waterford (Yvonne Strahovski), contraintes de « cohabiter » le temps du trajet. La première est accompagnée de sa fille, Nichole, tandis que la veuve du commandant voyage avec son bébé, Noah.
Plus vraiment ennemies mais encore loin d’être amies, les deux femmes recréent d’entrée ce lien complexe qu’elles entretiennent depuis le premier épisode. Une relation qui oscille entre oppression (infligée pour l’une et subie pour l’autre), manipulation et, parfois, une forme de respect mutuel.
Une vraie parenthèse d’humanité, dont les premières minutes de ce sixième opus sont justement magnifiquement empreintes. Par leur jeu de regards notamment, ces alliées inattendues distillent, dans une belle tension, les sentiments contradictoires qui les animent autant qu’ils nous parcourent, et qui contribuent à faire le sel de la série. D’autant que les événements vont accélérer leur destin (commun) : à bord de ce train de l’espoir, les intérêts des uns et des autres divergent en effet au point que June et Serena doivent soudain s’unir. En ce sens, les dernières secondes du premier épisode devraient en surprendre plus d’un.
Le récit happe par sa complexité, son univers hors norme
Deux ans et demi après la diffusion de la cinquième saison et de son cruel cliffhanger, nous y voilà : la révolution entreprise par June va-t-elle enfin éclater ? « Levez-vous et combattez pour votre liberté », pouvait-on entendre de sa bouche dans le teaser de cette suite.
Au fil des nouveaux épisodes, force est de constater que la promesse devrait être tenue. Retour à Gilead (ce monde dystopique malveillant et sans pitié), infiltration et manœuvres au cordeau sont au programme du destin de celle que ses bourreaux avaient jadis baptisée « Offred », lorsqu’elle n’était plus qu’une pauvre servante forcée à enfanter. La rébellion est donc bel et bien en marche face à cette société misogyne, totalitaire et sans pitié, qui se fissure de toute part. Et June ira jusqu’au bout ! À ses côtés, Luke, son mari, et Moira, sa meilleure amie.
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Ensemble, ils forment une résistance prête à tout pour renverser la République. En parallèle, deux personnages emblématiques de Gilead, le commandant Lawrence (l’un des architectes de cet enfer) et la sinistre tante Lydia (chargée de « dresser » et de punir les Servantes), sont rattrapés par leur passé.
Avant même d’écrire l’épilogue de la saga, Bruce Miller, son créateur, disait vouloir obtenir un résultat qui « reste dans l’histoire de la télévision ». Alors, mission accomplie ? Sans conteste tant ce final nous scotche de bout en bout. Par sa galerie de personnages, sa réalisation, son intensité dramatique et son atmosphère fidèle aux premières (et meilleures) saisons de la série adaptée du roman de Margaret Atwood, cette dernière salve de The Handmaid’s Tale achève brillamment une saga déjà culte.
Et les fans se réjouiront que son issue soit une sorte de pirouette qui ouvre le champ à The Testaments, le spin-off de l’histoire, qui se déroulera quinze ans plus tard. Mais avertissement aux néophytes : se plonger dans ces dix nouveaux épisodes sans avoir englouti au préalable les 56 précédents reviendrait à essayer d’apprendre le cantonais en vingt-quatre heures ! Les codes, les protagonistes, les métaphores constantes et les intrigues enchevêtrées construisent un univers hors norme qu’il convient d’avoir apprivoisé bien en amont. Et c’est justement par sa fascinante complexité que son récit nous happe jusqu’à nous prendre aux tripes.
The Handmaid’s Tale, saison 6 ★★★ de Bruce Miller, avec Elisabeth Moss, Yvonne Strahovski. Dix épisodes de 50 minutes. Mardi à 20 h 50.
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