Une décennie après Constellation, sur le destin commun des passagers du vol d’Air France qui ont péri avec Marcel Cerdan, Adrien Bosc s’intéresse à un autre météore : Tristan Egolf (1971-2005) qui s’est suicidé en Pennsylvanie, à 33 ans, avec une arme à feu comme Hemingway. La même fin que son père. Le romancier mémorialiste découvrit l’écrivain américain quand il tomba sur Le Seigneur des porcheries (1998), en édition de poche dont la couverture montre un homme qui se cache le bas du visage, imitant James Dean, col roulé jusqu’au ras des yeux. Adrien Bosc s’est transformé en détective, à la manière de Patrick Modiano en quête du fantôme de Dora Bruder, pour en savoir plus sur l’auteur de l’Ovni littéraire garni de paumés de l’Amérique profonde.
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Puisque le hasard est un rendez-vous, Modiano favorisa l’entrée chez Gallimard de l’espoir littéraire que lui présenta sa fille Marie, sous le charme de l’inconnu qui chantait en 1994 du Bob Dylan en pensant à Rabelais et Céline, sur le pont des Arts. Passée inaperçue dans son pays natal, la mort du fils d’une peintre et d’un journaliste fut saluée en France telle la perte d’un Radiguet d’outre-Atlantique qui « côtoyait, par-delà les tombes, Fante et Bolaño ».
Autrement dit, l’artiste maudit d’un livre culte, digne de « Steinbeck, Faulkner et Lowry ». Les comparaisons étaient si élogieuses qu’il était possible d’être en face d’un canular du genre Boris Vian alias Vernon Sullivan ou Romain Gary alias Émile Ajar, voire Ronceraille, auteur fictif inventé par Claude Bonnefoy. Y compris les faits répréhensibles, Adrien Bosc restitue la biographie express de Tristan Egolf, finalement publié aux États-Unis par ceux qui avaient refusé ses manuscrits.
L’auteur s’est mué en détective, à la manière de Modiano
Il y a un effet miroir : le limier aurait pu être celui qu’il fait renaître avec des pans de blues arrachés à l’oubli, soit Rastignac qui devient Lucien de Rubempré, à force d’illusions perdues même quand il devint père de deux filles dont une qu’il n’attendait pas. Le militant pacifiste, opposé à la guerre en Irak, fut arrêté en juillet 2004 lors d’une manifestation hostile à George W. Bush. L’écorché vif appartient à ces grands brûlés de la vie, tels Jacques Vaché ou Klaus Mann. Entre deux ivresses, il était devenu un mythe vivant perdu dans une industrie de vedettes. Il n’a pas eu envie d’attendre d’être dans la Pléiade
L’invention de Tristan, Adrien Bosc, Stock, 245 pages, 20,50 euros.
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