Une nouvelle guerre va-t-elle s’ouvrir entre l’école et les familles ? Adopté le 10 avril dernier en commission, lors des débats sur la proposition de loi relative aux soins palliatifs et à l’accompagnement, l’amendement AS449, déposé cinq jours plus tôt par les députés Agnès Firmin-Le Bodo et François Gernigon (Horizons), propose d’introduire dans les programmes scolaires du primaire et du secondaire « des séances d’information sur le cycle de la vie et de la mort, avec l’intervention de bénévoles issus d’associations d’accompagnement reconnues, laïques, apolitiques et aconfessionnelles ».
L’objectif affiché : « Permettre aux enfants de partager leurs interrogations sur le sujet trop généralement tabou de la mort et apprendre combien une présence solidaire est précieuse pour les personnes malades ou âgées approchant de leur mort », ont expliqué les deux élus, s’appuyant sur une suggestion de la Fédération Jalmalv, une association loi 1901 qui milite pour une meilleure reconnaissance de l’accompagnement en fin de vie.
La proposition a immédiatement suscité des crispations. « Nous avons tous un déni par rapport à cette question de la mort et peut-être un rejet de notre propre finitude, pour autant cela me semble difficile d’introduire une telle obligation dans des programmes scolaires qui font déjà l’objet de nombreux débats. Ce sujet relève également de la sphère familiale et personnelle », a réagi Annie Vidal, corapporteure de la proposition de loi. La députée Renaissance a aussi fait part de ses inquiétudes quant à la possible intrusion que pourrait représenter, pour certains parents, la présence de bénévoles dans les classes, et a émis un avis défavorable… avant de s’en remettre finalement « à la sagesse de la commission ».
« Ce qu’on craint par-dessus tout, c’est la dérive des intervenants »
Du côté du RN, les réactions ont été beaucoup plus vives. Julien Odoul s’est dit « très choqué » par cette proposition, estimant que « ce n’est pas à des associations, quelles qu’elles soient, de venir dans des classes expliquer à des enfants de 6 ou 7 ans qu’ils pourront peut-être bénéficier, dans 70 ou 80 ans, d’une aide active à mourir ». Un propos fermement rejeté par François Gernigon, qui a tenu à préciser qu’il ne s’agissait pas d’une « information sur l’aide active à mourir »,mais d’une sensibilisation sur la façon d’aborder la mort. « Expliquer la mort, ce n’est pas dire comment on donne la mort », a appuyé le député centriste Philippe Vigier. L’argument n’a pas suffi à rassurer les bancs du RN.
Eddy Casterman a lui aussi exprimé ses réserves, rappelant que « l’école est là pour instruire, non pour se substituer aux familles », dont la perception de la mort varie selon les croyances religieuses ou les convictions philosophiques. « Ce qu’on craint par-dessus tout, c’est la dérive des intervenants qui viendront dans les écoles dispenser cette instruction dont on ne connaît ni les contours ni le fond du sujet, avec des associations qui peuvent faire la promotion de l’aide active à mourir », a-t-il ajouté.
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Un précédent récent vient renforcer ces craintes. En janvier dernier, une enquête du Syndicat de la Famille a révélé que certaines associations agréées par l’Éducation nationale pour intervenir sur l’éducation affective et sexuelle adoptaient des discours militants, en contradiction avec le principe de neutralité pourtant affiché par le ministère. Certes, la Fédération Jalmalv, qui a inspiré cet amendement, œuvre au développement des soins palliatifs qui offrent « une alternative à une question éthique que l’euthanasie laisse sans réponse ». Mais quelles seront les autres associations autorisées à intervenir ?
Interrogée par le JDD, Pascale Morinière, présidente des Associations familiales catholiques (AFC), voit dans cette proposition le signe d’une école « conçue comme un outil de rééducation de l’État ». Elle appelle à « retisser des liens de confiance entre les familles et l’école plutôt que de saper davantage ces relations ».
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