« Nous sommes en train de vivre une révolution qui arrive une fois tous les cinquante ans », souligne d’emblée Thibaut de la Grand’rive. Une bouille et une voix de jeunot, mais déjà un appétit de géant. Avec son frère Pierre, ils se sont lancé un pari fou : aller défier Google et Microsoft. Rien que ça ! En 2023, sentant qu’il y avait une « place à prendre », ces deux petits génies de 28 et 25 ans – formés à Polytechnique et à l’Iéseg (une grande école de commerce) – ont ainsi créé Delos, une start-up française spécialisée dans les suites bureautiques dopées à l’intelligence artificielle. L’objectif ? « Rendre l’utilisation de l’IA aussi simple et intuitive que possible, en proposant une interface ne nécessitant que peu ou pas de formation pour les utilisateurs », explique Thibaut.
Pour ce faire, leur société propose une plateforme tout-en-un. Sept produits regroupés en une seule offre, supposée dynamiser comme jamais la productivité. Parmi eux, un assistant d’écriture, des comptes-rendus automatiques de réunions, un moteur de recherche (ultra)intelligent, un traducteur instantané « plus contextuel et nuancé que ceux existant en ligne » et, surtout, un robot conversationnel. Il suffit de lui demander d’aller éplucher notre drive (espace de stockage) pour retrouver une donnée bien précise afin qu’il nous l’affiche en une fraction de seconde. Ou de lui indiquer de générer une newsletter pour qu’il s’exécute. Une fonctionnalité baptisée voice to computer (de la voix à l’ordinateur) qui, à l’heure actuelle, n’a pas de réel équivalent sur le marché. « La voix, c’est le clavier du futur », poursuit fièrement le jeune entrepreneur. La démonstration à laquelle nous avons pu assister était bluffante.
Un seul et unique écosystème
Là où il faut d’ordinaire jongler entre une dizaine d’applications spécialisées dans l’IA en fonction de ses besoins, le produit de nos deux Français est une petite révolution qui propose un seul et unique écosystème intelligent. En résumé, Delos, c’est un condensé de ChatGPT et d’une suite bureautique mis dans un shaker pour former un cocktail qui facilite la vie de bureau. Et les clients sont légion… puisque cette plateforme de nouvelle génération compte déjà environ 10 000 utilisateurs répartis dans plus de 200 entreprises.
Parmi eux, des poids lourds comme TotalEnergies, le groupe Casino ou encore Best Western, la chaîne d’hôtel américaine, et Shiseido, le mastodonte du cosmétique japonais. Et si Pierre et Thibaut de la Grand’rive s’implantent solidement en France, ils ne font pas mystère de leurs ambitions internationales. Avec leur vingtaine d’ingénieurs, tous recrutés dans les plus grandes écoles de l’Hexagone, ils assument clairement leur rêve de grandeur : « Nous sommes persuadés que les ingénieurs français ont largement leur place dans ce nouvel écosystème. D’autant que l’on est sur un secteur qui n’est pas régi uniquement par les investissements, mais surtout par les idées. Et nos “cerveaux” peuvent faire de très belles choses, et réussir aux États-Unis… »
« Rendre l’utilisation de l’IA aussi simple et intuitive que possible »
Mais si les outils qu’ils développent marchent clairement sur les plates-bandes de Workspace (la suite bureautique de Google) et d’Office 365 boostée par Copilot (celle de Microsoft), ils se défendent de vouloir tuer les deux ogres américains : « Car on est complémentaires. Delos se connecte même à leurs environnements, comme à d’autres, pour en tirer parti. Mais on a clairement une place à se faire, c’est sûr… » En somme, même s’il se défend de n’être qu’un assembleur, le concept de Delos est essentiellement de savoir combiner astucieusement les forces des grands acteurs (d’IA) du marché, en piochant au bon endroit, au bon moment, grâce à un système de routage rapide et intelligent.
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Poursuivant leur ascension spectaculaire, le 14 avril dernier, au cours d’un événement organisé en grande pompe place Vendôme, à Paris, les deux patrons annonçaient avoir bouclé une levée de fonds de 2,5 millions d’euros dans l’optique d’imposer un OS (système d’exploitation) français. « Ces ressources serviront à accélérer le développement technique pour pouvoir suivre le rythme rapide d’évolution des modèles d’IA, ainsi qu’à agrandir l’équipe commerciale afin de capitaliser sur le succès initial de la plateforme », confie Thibaut de la Grand’rive.
Un coût modique de 25 euros par mois
Au passage, les deux frères ont annoncé quelques grandes nouveautés qui viennent enrichir leur plateforme. Notamment un système de mémoire qui promet de retenir les habitudes des utilisateurs afin de faciliter (encore plus) leurs futures interactions, « en prenant particulièrement en compte le contexte de l’entreprise ». La promesse est aussi simple que délirante : en quelques heures, il est possible d’effectuer certaines tâches qui pouvaient auparavant prendre plusieurs semaines.
L’autre avantage de Delos est sa tarification. Proposé à 25 euros par utilisateur par mois, avec un prix dégressif pour les grandes entreprises, il permet un tout-en-un qui réduit le nombre d’abonnements. Un exemple parlant ? L’abonnement à ChatGPT Plus – ici intégré – coûte à lui seul 25 euros mensuels. À l’image de Mistral AI, la désormais célèbre start-up française qui développe des modèles d’intelligence artificielle performants au point de devenir une réelle alternative au modèle américain, Delos semble très bien parti pour jouer des coudes avec les géants de son secteur. Toutes proportions gardées, certes, mais en seulement deux ans, son essor est déjà spectaculaire.
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