Enfin un consensus ! Mais ce n’est peut-être pas celui que le président de la République espérait en annonçant, le 3 mai, le lancement d’une nouvelle convention citoyenne… qui a aussitôt essuyé un tir nourri de critiques de tous bords. Comme les précédentes, consacrées à la transition écologique et à la fin de vie, la convention citoyenne sur « les temps de l’enfant » doit réunir des citoyens tirés au sort qui seront cornaqués par le Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Ses travaux débuteraient en juin pour se terminer à l’automne. Des journées scolaires moins chargées ? Qui démarreraient moins tôt ? Plus de sport ? Des vacances raccourcies ? De nombreux sujets qui découlent de l’intérêt déjà ancien d’Emmanuel Macron pour cette question des « rythmes scolaires » – même si l’expression n’a plus cours, trop évocatrice du feuilleton de la semaine de quatre jours et demi…
Le président souhaite que « l’organisation des journées de nos élèves soit plus favorable à leur développement et aux apprentissages », a-t-il confié au Parisien-Aujourd’hui en France. Soucieux du risque de décrochage scolaire, le chef de l’État avait déjà pointé du doigt la longueur des vacances d’été. Ces dernières sont pourtant plus longues encore chez plusieurs de nos voisins européens… Mais au total des jours de vacances, la France est dans le peloton de tête : les écoliers français ont 162 jours de cours par an, contre 183 en moyenne dans les pays de l’OCDE.
Les syndicats d’enseignants ont bondi : « Un hors sujet » pour Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, qui attaque un président qui « fait diversion pour ne pas s’occuper des urgences et masquer l’état de l’École qui s’effondre ». Moins critique, le président de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) encourage le débat, pour repenser un système éducatif « arrivé à un point de rupture ». Mais il souhaite « une approche beaucoup plus globale ». Max Brisson, sénateur LR et ancien inspecteur général de l’Éducation nationale, fulmine : « Mais quel est donc ce pays où le président de la République se préoccupe des horaires scolaires ? Ne devrions-nous pas plutôt rechercher une plus large liberté d’organisation des établissements ? »
À gauche, Alexis Corbière fustige « l’agitation pitoyable d’un président perdu » : « Cet homme ne consulte ni citoyens, ni députés sur l’âge de la retraite, ni sur le budget, et sur aucune autre question fondamentale… mais veut organiser une consultation “citoyenne” sur les rythmes scolaires », tance le député de Seine-Saint-Denis.
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« Que cette innovation démocratique s’ancre dans les pratiques est une excellente chose », juge Emmanuel Macron. Thierry Beaudet, le président du Cese, défend « la démocratie participative et sociale » comme une réponse au « malaise démocratique ». Le Cese n’a pourtant pas l’air très disposé à s’emparer des « conventions citoyennes décentralisées » sur l’identité nationale, restées pour l’instant au stade d’annonce, faite par François Bayrou fin février…
Reste que les conventions citoyennes sont contestées pour le flou sur le caractère engageant ou non de leurs recommandations, pour le biais de sélection des citoyens, voire pour les orientations des experts qui aiguillent les débats. En 2020, dans une note pour l’Institut du Pont-Neuf, les professeurs de droit Frédéric Rouvillois et Christophe Boutin concluaient que cette « merveilleuse invention n’est pas, comme certains l’ont proclamé, le triomphe ultime de la démocratie, mais un trou noir où, supplantée par le règne des experts, celle-ci risque de disparaître tout entière ».
Qui se souvient du Conseil national de la refondation ou du si décisif « collectif citoyen sur la vaccination » ? Les instances politiques ou citoyennes prolifèrent, mais l’anniversaire prochain du référendum sur le traité constitutionnel européen, rejeté le 29 mai 2005, rappelle qu’en parallèle, le référendum a été délaissé depuis bientôt vingt ans… Sans prononcer le mot, Emmanuel Macron avait pourtant annoncé le 31 décembre dernier qu’il appellerait les Français à « trancher » des sujets importants. Dans les colonnes du JDD, dimanche dernier, François Bayrou a lancé l’idée d’un référendum pour faire adopter le budget. En attendant, les demandes de démocratie directe, inopérantes ou aussi ignorées que les cahiers de doléances des Gilets jaunes, trouvent pour seule réponse leur mise en scène…
Dernier avatar des « grands débats », une émission spéciale ce mardi verra Emmanuel Macron débattre avec « des personnalités issues de la société civile ». Peut-être pourront-ils lui suggérer un référendum… sur les conventions citoyennes ?
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