
Strate administrative inutile ou révolution face au crime organisé ? À peine inauguré par le président de la République, l’Emco, identifié comme l’une des mesures phare de la loi contre le narcotrafic, fait déjà parler de lui. Administré par la direction nationale de la Police judiciaire (DNPJ) et localisé à Nanterre, cet état-major se rêve en « tour de contrôle » de la lutte contre la criminalité organisée.
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En son sein, une lourde artillerie interministérielle, regroupant DGSE et DGSI, les services de renseignement douanier, pénitentiaire et territorial, ainsi que le glaive de Bercy contre la criminalité financière, Tracfin. Pour le diriger, la commissaire Sandrine Desliard, épaulée par un gendarme et un douanier, tous deux issus des services de renseignement de leurs administrations respectives. « Encore un machin dans le bidule qui a des airs plus technocratiques qu’opérationnels, juge un haut fonctionnaire. Les services de renseignement épaulent déjà la Police judiciaire depuis plusieurs années, je ne vois pas ce qui pourrait changer ! »
À l’inverse, l’entourage du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, qui a impulsé le projet, défend un véritable changement. « La méthode de travail est différente : on met au même endroit les différents services de renseignement, sous un commandement unique, et on fluidifie les communications dans cet état-major centralisé. » Mais certains continuent à douter, répétant que faire travailler autant d’opérateurs issus de services différents, aux cultures diverses, pourrait s’avérer compliqué.
Les critiques fusent par exemple du côté de la gendarmerie, reléguée au second plan, malgré un Service central de renseignement criminel (SCRC) réputé compétent. « On se retrouve sous l’autorité de la Police nationale, c’est assez incompréhensible ! Pourquoi ne pas avoir créé une structure gérée directement par Beauvau, comme le Comcyber-MI par exemple, qui fonctionne très bien ? » s’interroge un gendarme. Impossible : « L’Emco est une autorité interministérielle, qui n’a pas vocation à être pilotée directement par le ministère de l’Intérieur », répond la Place Beauvau. Selon nos informations, c’est un autre bras de fer qui s’est joué sur ce point, autour de l’incorporation de la DGSE au sein de ce nouvel état-major. Pas question pour le ministère des Armées de dépendre de l’Intérieur !
Les critiques fusent par exemple du côté de la gendarmerie, reléguée au second plan
Au-delà de ces guerres éternelles entre services, l’ancien coordinateur national du renseignement, Jérôme Poirot, tranche : « C’est une bonne chose de visibiliser l’action des services de renseignement, dont les moyens sophistiqués sont plus qu’utiles dans ce domaine. Mais in fine, c’est bien la Police judiciaire qui aura la main sur les enquêtes. » L’avenir complétera l’analyse : l’Emco va de toute façon devoir attendre la création du parquet national anticriminalité organisée (Pnaco) pour agir… et son inauguration ne pourrait pas avoir lieu avant plusieurs mois.
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