Tout juste de retour de son premier passage au Festival de Cannes pour défendre le film Pillion, de Harry Lighton, en compétition à Un Certain Regard où il a reçu le prix du scénario, il ne peut dissimuler ses cernes naissants. Mais avec quelques mots de français au cours d’un entretien en visio, Alexander Skarsgard s’anime dès qu’il évoque son nouveau « bébé » : une série de science-fiction délirante dans laquelle le beau gosse suédois s’est personnellement investi. Celui qui jongle entre le petit écran (True Blood, Big Little Lies) et le grand (Tarzan, LeeMiller) nous raconte comment il s’est glissé dans le corps d’un androïde qui a un sérieux pète au casque.
Le JDD. Comment vous êtes-vous préparé pour un rôle aussi spécial ?
Alexander Skarsgard. J’ai grandi dans les années 1980-90, nourri par beaucoup de science-fiction, et notamment Star Wars qui a profondément marqué mon imaginaire. Murderbot est le tout premier projet du genre auquel je participe, ce qui a décuplé mon enthousiasme. Ma principale source d’inspiration a été Défaillances système, le roman de Martha Wells publié en 2017 sur lequel repose la première saison de la série.
Je me suis ensuite attaché à travailler l’apparence du robot, ainsi que sa manière de s’exprimer, avec cette posture fermée, cet évitement du regard, et cette voix off très présente qui guide le récit. Je voulais que chaque geste, chaque silence, soit chargé de sens. Sans mouvements superflus ni bavardages inutiles.
Justement, l’un des aspects les plus fascinants de la série est cette manière dont vous humanisez subtilement ce robot…
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C’est ce qui m’a intéressé ! Car il est forcé d’affronter son humanité : il vient de pirater son module de contrôle pour s’émanciper, il n’est donc pas qu’une machine et son côté organique le rattrape. Peu à peu, il tisse des liens avec les hommes et interagit avec eux, mais c’est inconfortable pour lui. Alors il préfère regarder des soap operas spatiaux pour observer les émotions des autres sans y prendre part.
Diriez-vous que Murderbot est aussi une forme de satire sociale ? En s’interrogeant sur notre monde, notamment avec l’émergence de l’intelligence artificielle…
À sa manière, il propose une réflexion fine sur notre condition humaine, c’est vrai. En explorant notre existence à travers le prisme de personnages venus d’ailleurs. C’est justement dans ce contexte que la science-fiction est en général la plus efficace. La série aborde les thèmes de la connexion, de l’identité, et amène à s’interroger sur la signification d’être, ou de ne pas être, un humain.
« C’était difficile de supporter le costume, qui était terriblement chaud »
Comme souvent, vous livrez une prestation physique impressionnante. Cela vous demande toujours une préparation particulière ?
Ça dépend vraiment du projet. Pour Tarzan ou The Northman, j’avais suivi plusieurs mois d’entraînement intensif, parfois extrême. Cette fois, cela n’a pas été aussi intense car je n’avaispas besoin d’une transformation musculaire spectaculaire. En revanche, je devais être en excellente condition physique pour supporter le costume, qui était terriblement chaud (rires) ! J’ai donc surtout mis l’accent sur l’endurance.
Par ailleurs, vous êtes également producteur exécutif de la série. Racontez-nous ce que ça implique…
J’ai collaboré étroitement avec Chris et Paul Weitz, les créateurs, plus d’un an avant le début du tournage. Je me suis beaucoup investi dans le processus créatif, ce qui est un véritable luxe pour un acteur. Cela nous a permis d’explorer en profondeur les personnages, de tracer avec précision le parcours du héros au fil de la première saison, et de travailler sur les moindres détails : le design des vaisseaux, des habitats, ou encore sa combinaison si particulière.
Vous qui enchaînez autant les films que les séries, avez-vous une préférence ?
Non, pas vraiment. Mais ce qui est passionnant avec les séries, c’est le temps qu’elles laissent pour développer un personnage : on dispose souvent de dix heures au lieu de deux. Et puis aujourd’hui, elles offrent beaucoup plus de liberté : autrefois, les épisodes devaient faire trente ou soixante minutes pendant toute une saison, désormais les durées peuvent différer. Cette souplesse est incroyablement stimulante pour les scénaristes bien sûr, mais aussi pour les acteurs.
Murderbot ★★★
Désabusé par l’espèce humaine, l’un des Sec Units, ces androïdes à son service, parvient à pirater son propre système. Désormais doté de libre arbitre, il pense pouvoir échapper à l’emprise de ces hommes qui le consternent autant qu’ils le fascinent. Lorsqu’il est missionné pour protéger un groupe de scientifiques sur une planète désertique, les événements qui s’enchaînent bousculent ses convictions. Car cet inconditionnel de Lune Sanctuaire, une sitcom à la Star Trek en mode ultra-kitsch, est loin de n’être qu’un tas de ferraille sans âme… Drôle et constellé de punchlines venues de l’espace, Murderbot est un ovni qui rafraîchit délicieusement la SF.
De Chris et Paul Weitz, avec Alexander Skarsgard, Noma Dumezweni. Dix épisodes de 25 minutes. Disponible sur Apple TV+.
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