Le scandale éclabousse la hiérarchie. Après la mise en examen de deux policiers en avril pour trafic de stupéfiant en bande organisée et blanchiment, puis celle d’un troisième homme en juin, ce sont désormais deux hauts gradés qui font l’objet de poursuite. La cheffe de l’OFAST (Office antistupéfiants) de Marseille et son adjoint ont été mis en examen mercredi et jeudi par les juges d’instruction de la Juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (Junalco), a confirmé le parquet de Paris.
Ils sont accusés de « complicité de faux en écriture publique par une personne dépositaire de l’autorité publique » et « violation du secret d’une enquête portant sur la criminalité organisée ». Les deux hauts gradés sont aussi mis en examen pour « complicité d’atteinte à l’intimité par captation d’images et de paroles », selon le ministère public.
Livraison surveillée ratée
Ces mises en examen interviennent dans le cadre d’une enquête sur une livraison surveillée en 2023 de cocaïne, qui a tourné au fiasco. Tout commence par un renseignement anonyme portant sur une arrivée de cocaïne au port de Marseille en container depuis la Colombie et à destination de la région parisienne. Il est alors décidé de mettre en place une « livraison surveillée », baptisée « Opération Trident », pour identifier des réseaux.
Mais l’opération tourne au vinaigre, aucun narcotrafiquant d’envergure ne se montre intéressé et la cocaïne se volatilise. Il s’est « avéré que cette livraison a permis l’entrée sur le territoire de près de 400 kg de cocaïne », indique le parquet. « Plusieurs acteurs du dossier s’étaient par ailleurs étonnés de la difficulté avec laquelle ces stupéfiants auraient été écoulés à Marseille, laissant entendre que la surveillance policière était éventée. »
L’enquête dirigée par la Junalco a révélé, selon le ministère public, de possibles « échanges entre des policiers et d’autres personnes, portant sur la cession d’au moins 360 kg de cocaïne, en dehors de tout contrôle hiérarchique, et sur la dissimulation des quantités réelles arrivées sur le territoire ».
« Lanceur d’alerte »
« Après deux jours de garde à vue, ma cliente, cheffe de l’OFAST Marseille, n’est ni mise en examen pour corruption, ni […] pour trafic de cocaïne, ni […] pour importation de stupéfiants en bande organisée », a souligné son avocat, Louis Cailliez. Pour lui, la garde à vue a justement « permis de lever les doutes sur l’absence de connaissance (et donc de validation) hiérarchique du déroulement réel du dossier Trident ». « Elle conteste vigoureusement toute infraction pénale de sa part et défendra son honneur et sa probité en dépit des tentatives d’instrumentalisation de ce dossier », ajoute-t-il.
« Avec ma consœur, Marie Cornanguer, nous nous réjouissions de la légitime mise hors de cause du commissaire X du cœur de ce dossier concernant des faits de trafic de stupéfiants », a réagi de son côté auprès de l’AFP Me Vanessa Bousardo, avocate de l’adjoint.
« Sa mise en examen résiduelle alors même qu’il est l’auteur du signalement à l’origine de cette procédure sera contestée par toutes les voies de droit à notre disposition. Une telle mise en cause adresse d’ailleurs un très mauvais signal aux lanceurs d’alerte », a-t-elle estimé.
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Selon elle, « ce fonctionnaire intègre, qui ne s’est jamais départi de sa probité, conteste catégoriquement les faits qui lui sont lui imputés ». « Une requête en nullité sera déposée prochainement à l’encontre de sa mise en examen et des irrégularités relevées », a-t-elle ajouté.
Placés sous contrôle judiciaire, les deux commissaires ont interdiction d’exercer des fonctions et missions de police judiciaire, de se rendre dans tous les locaux de police des Bouches-du-Rhône et interdiction d’entrer en relation avec d’autres personnes apparaissant dans le dossier.





