Crise politique et religieuse, à Avrechy (Oise). L’organisateur des célébrités de fin d’année étant le principal opposant à la maire, et tous deux étant candidats aux élections, le curé a préféré rester neutre. Le diocèse a été saisi.
En poussant les portes de l’église du village d’Avrechy (Oise) l’an dernier, certains paroissiens ont découvert avec surprise la chaude ferveur qui s’empare du bel édifice pendant la période des fêtes de Noël. « C’était la première fois que j’allais à la messe. J’étais étonnée, il y avait du monde », se souvient une habitante de la petite commune d’environ 1 150 habitants.
Deux jours précédents cette messe de l’Avent organisée le 20 décembre dernier, une crèche et un sapin avaient été installés, puis un goûter avait égayé le lieu de culte. « Ils avaient fait les choses en grand. »
Mais dernièrement, les bénévoles les plus impliqués dans ces célébrations sont tombés de leur chaise. Cette année, il n’y aura ni crèche, ni messe de l’Avent. Le curé de la paroisse du Clermontois, a dit niet. De quoi susciter l’incompréhension de Jean-Charles Lefèvre, l’organisateur à l’initiative de ces festivités, qui a aussitôt saisi Jacques Benoit-Gonnin, l’évêque du diocèse.
« Si on ne peut plus être élu et chrétien… »
Plus étonnant encore, c’est la raison qui entraîne une telle incompréhension. Si cette année, la situation a viré à la querelle de clocher au sens littéral, c’est que le père Jean-Frédéric Plateaux était soucieux de préserver le lieu de culte… des élections municipales. Et pour cause : l’organisateur des festivités est également candidat pour le fauteuil de maire dans ce village du Plateau picard.
Conseiller municipal (SE) d’opposition et président de l’association des commerçants, Jean-Charles Lefèvre était par ailleurs l’ancien premier adjoint de l’actuel maire (SE), Astrid Lequen, lorsqu’il a initié les premières festivités dans l’église. Il avait démissionné en 2024 et rejoint l’opposition.
« J’avais pris l’initiative il y a maintenant 4 ans de redonner vie à notre église et aux festivités de la nativité et de l’Avent, nous confie-t-il. Le père Plateaux m’a reçu au presbytère (le 30 octobre, NDLR) pour me dire que cette année, au vu des élections, il ne préfère pas qu’il se passe quoi que ce soit au sein de l’église. »
Le curé lui a d’abord motivé son choix en faisant valoir qu’il n’était plus coutume d’organiser des messes en semaine. « C’est quelque chose qui avait donné satisfaction mais je ne voulais pas le transformer en tradition, ça n’existe pas ailleurs la messe de l’Avent. Je lui ai dit qu’on pouvait envisager une messe le 24 au soir », explique-t-il. Mais là, c’est l’horaire fixé à 20h30 qui « ne convenait pas » pour mobiliser une équipe paroissiale suffisante afin d’animer la messe.
Pour ce qui est de l’installation de la crèche, le curé justifie sa décision par le contexte local. D’après lui, la position d’opposant de l’organisateur pouvait « prêter à confusion » et être « mal interprétée ». « La proximité des élections et la particularité de la situation publique connue, pose problème », ajoute-t-il.
« Si on ne peut plus être élu et chrétien c’est dommage », se désole le candidat à la mairie qui se défend de toute politisation de l’événement. « Ces festivités autour de l’église n’ont jamais été et ne seront jamais estampillées Jean-Charles Lefèvre. Il ne faut pas tout confondre. La foi fait aussi partie de ma vie et ça me regarde moi mais ça n’a rien à voir avec mon engagement au sein de la municipalité. Ce sont deux choses différentes. »
Et c’est justement le point de désaccord fondamental entre les deux : « Je lui ai fait remarquer, qu’on ne peut pas jouer sur deux tableaux », assure Jean-Frédéric Plateaux qui insiste : « La vie communale c’est une chose, la vie paroissiale c’en est une autre. » Et de conclure : « L’église est au milieu du village pour tout le monde, qu’on soit pour Astrid Lequen ou Jean-Charles Lefèvre et moi je suis au service des habitants de la commune. »
Parmi les habitants rencontrés, les réactions sont mitigées. « On parle d’une crèche dans un petit village, il n’y a pas lieu d’en faire toute une histoire », se désole une habitante. Une autre nuance : « C’est dommage que ça impacte le village, ça nous prive quelque part mais c’est dur pour le curé, c’est lui qui gère paroisse il veut éviter les conflits. »
D’autres tiennent à la stricte séparation entre la politique et la religion. « En tant que candidat il n’a rien à dire de ce qui se passe à l’église. Il doit rester neutre. Il aurait dû laisser l’église gérer ses propres cérémonies. »
Le candidat aux élections se dit prêt à se mettre en retrait de l’organisation des festivités cette année. Mais pas de quoi influer sur la décision du curé. Jean-Charles Lefèvre s’en remet à présent à la décision de l’évêque. De son côté, le diocèse nous confirme qu’une réponse « lui sera donnée prochainement ». Contactée, la maire n’a pas souhaité commenter la situation.







