À l’issue d’une campagne tendue pour le renouvellement des chambres d’agriculture, les élections ont livré, dans la nuit de jeudi à vendredi, un verdict qui rebat les cartes entre les syndicats. À ses trois fiefs conservés, la Coordination rurale (CR) ajoute une douzaine de départements conquis. « Objectif atteint, il faut maintenant passer la seconde pour exercer le contrepouvoir qu’on incarne désormais », savourait Véronique Le Floc’h, sa présidente, au lendemain de cette poussée « historique » pour le syndicat, né en 1991 d’une rupture avec la puissante FNSEA. Certains dirigeants de la CR rêvaient d’une percée plus forte encore, mais leur syndicat a réussi à colorer de jaune la carte des chambres départementales, et lorgne pour la première fois une chambre régionale – composée plus tard –, la Nouvelle-Aquitaine, qui lui est promise.
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La CR a beau jeu de se proclamer premier syndicat, fort de ses conquêtes et du tiers des voix, contre 21 % aux élections de 2019. C’est cependant l’alliance entre la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs (JA) qui reste dominante, avec près de la moitié des voix réunies, et les deux syndicats se satisfont à leur tour de voir leur tandem « en tête dans 80 % des départements » qu’ils dirigeront. Profil bas toutefois : leurs dirigeants ont revendiqué leur victoire « sans aucun triomphalisme », reconnaissant une part de responsabilité dans ce recul, et prenant acte de la colère exprimée, particulièrement localisée dans des terres en difficulté économique et climatique. « Ce vote a prospéré sur les promesses non tenues depuis près d’un an par les pouvoirs publics, qui ont alimenté un sentiment d’abandon », pointe aussi Arnaud Rousseau, président de la FNSEA. « Les problèmes de l’agriculture demeurent », confie le dirigeant qui avait placé sa campagne sous le signe du « goût d’entreprendre » et qui avertit ses concurrents : « Commenter, ce n’est pas le même exercice que d’assumer les responsabilités… »
La CR lorgne pour la première fois une chambre régionale
« Qu’ils reviennent dans un monde agricole réel, celui d’une agriculture familiale qui veut conserver sa liberté », pique-t-on en retour à la CR. « On va pouvoir passer à autre chose, au travail de fond », souffle un nouvel élu. Les attentes restent brûlantes, à commencer par le projet de loi d’orientation agricole, dont l’examen a enfin débuté cette semaine au Sénat. Les éventuelles avancées seront décisives pour l’ambiance du Salon de l’agriculture, qui s’ouvre le 21 février. La visite sous cloche d’Emmanuel Macron avait gâché l’inauguration l’an dernier, au lendemain de l’annonce incendiaire d’une invitation des Soulèvements de la Terre et d’autres activistes écologistes radicaux, lancée par l’entourage présidentiel. « On ne veut pas revivre ces scènes de guérilla, des gens bloqués, des halls fermés… avertit Arnaud Rousseau. C’est d’abord une grande fête populaire qui accueille plus de 600 000 visiteurs. On souhaite tout de même un bilan de cette année écoulée : le président de la République a dit qu’il ne voulait pas courir derrière la colère, force est de constater que la colère s’est poursuivie sans lui… Qu’a-t-il à dire sur les domaines qui sont de sa compétence ? » Côté CR, on double la surface du stand, pour accueillir au mieux des troupes étoffées… et peut-être aussi pour marquer son territoire. Véronique Le Floc’h rappelle que le salon est une vitrine de l’agriculture, mais aussi « des hommes et des femmes qui travaillent ». Et ils ont encore beaucoup à dire aux nombreux politiques qui s’y presseront…
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