Et si le problème ne venait pas tant des oppositions majoritaires que de la coalition minoritaire qui gouverne ? À situation exceptionnelle, c’est peut-être à l’intérieur de ce que l’on appelle le « socle commun » que pourrait opérer l’effet déclencheur d’une nouvelle crise politique susceptible par ailleurs de dégénérer en crise institutionnelle. La faiblesse de l’assise parlementaire soutenant le gouvernement est évidemment en soi une difficulté quasi insurmontable, mais la fragilité de la cohésion gouvernementale s’avère l’être tout autant. Si le premier des paramètres rend possible à tout moment le renversement de l’équipe gouvernementale, ne serait-ce que par la force de l’arithmétique parlementaire, le second corrode de l’intérieur un gouvernement travaillé par ses divisions.
Des signes avant-coureurs ne cessent ces derniers jours de se manifester, venant témoigner des mouvements centrifuges qui se dessinent au sein même de l’axe gouvernemental. Pour preuve des plus récentes de ces perturbations, les échauffourées auxquelles a donné lieu, l’adoption sur le fil, en première lecture, de la loi imposant la parité pour les listes concourant aux municipales dans les communes de moins de 1 000 habitants.
Les parlementaires LR ainsi qu’une bonne partie des députés du groupe Horizon ont joint leurs voix au RN et aux ciottistes pour voter un amendement repoussant l’application de cette mesure après le scrutin de 2026. Il a fallu revoter après demande expresse issue des bancs gouvernementaux pour que soit rejetée la mesure de report.
« C’est un contexte où prévaut l’instabilité gouvernementale qui pourrait hypothéquer l’avenir du Premier ministre »
L’épisode s’inscrit dans la montée en puissance du doute parmi les LR quant à la pertinence de leur participation à un gouvernement qu’ils jugent par trop timoré ou immobile, au moment même où la bataille pour la présidence du parti oppose Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau – un enjeu interne qui n’est pas sans conséquences sur l’appariement des Républicains à la coalition gouvernementale. D’autres moments parlementaires pourraient répliquer très prochainement cette secousse initiale.
Sur la loi Paris/Lyon/Marseille (PLM), comme sur le texte visant à abroger les ZFE (Zones à faibles émissions) ou sur le dossier aussi existentiel qu’épineux des relations franco-algériennes, les dissonances au sein même du bloc central ne manqueront pas de se faire jour, ce d’autant plus que les difficultés rencontrées par le RN depuis la condamnation de leur candidate naturelle à une peine d’inéligibilité apparaîtront côté LR potentiellement comme une nouvelle fenêtre d’opportunité afin de reconquérir une partie de l’électorat de droite – captée ces dernières années par l’offre mariniste, même si à ce stade les sondages ne montrent pas d’infléchissement sensible dans ce sens.
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C’est un contexte où prévaut l’instabilité gouvernementale qui ainsi pourrait hypothéquer l’avenir d’un Premier ministre et de son gouvernement, confronté par ailleurs à l’ouverture dans son propre camp à la course à la succession d’Emmanuel Macron.
Le post-macronisme a bien commencé dans toutes les têtes et cet état de fait percole au point de déstabiliser ce qu’il reste du parti présidentiel ou ce qui en cherche à se survivre. Majoritaires dans une minorité gouvernementale, les macronistes et leurs alliés historiques n’en demeurent pas moins minoritaires à l’Assemblée, d’une part, et dans le pays, d’autre part. Si jamais les LR en venaient à retirer leur carte de l’édifice incertain né des législatives de 2024, c’est tout le château style IVe République (sous les ors abîmés de la Ve) qui en viendrait à s’effondrer, sans forcément de solution de rechange pour le président de la République.
Une perspective dont l’inéluctabilité s’indexera sur la mécanique imprévisible des événements, mais également sur les anticipations et les calculs d’opportunité des acteurs. Bref, la théorie des jeux appliquée à une politique qui est tout sauf une science exacte… Dans tous les cas, si jamais l’option d’une coalition se défaisait d’elle-même en venait à se confirmer, ce serait là un saut dans l’inconnu.
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