Insécurité, nuisances sonores, problèmes sanitaires, consommation de drogue… Malgré l’impact souvent désastreux que génèrent les rave-parties, les habitués ne comptent pas y renoncer. Les amateurs de ces célébrations musicales – souvent organisées illégalement dans des zones rurales – prévoient de manifester dans plusieurs villes de France ce samedi 12 avril. Leur revendication ? Défendre leur « droit fondamental » de faire la fête. Face aux risques de rassemblements, les préfectures de la Somme et de l’Indre-et-Loire ont d’ores et déjà pris des arrêtés pour interdire tous ces événements jusqu’à la mi-avril.
Le 5 avril dernier, 1 500 fêtards avaient déjà manifesté en musique à Montpellier. Dans le département de l’Hérault, ces rassemblements musicaux illicites ont été interdits par arrêté préfectoral pour une durée d’un an. La préfecture de la Haute-Marne a pris un arrêté similaire. Dans l’Aveyron, les rassemblements festifs à caractère musical non autorisés seront également interdits jusqu’à la fin du mois de septembre.
« La loi n’est pas assez dissuasive »
Ces interdictions successives suscitent la colère des fêtards. D’autant qu’une proposition de loi visant à renforcer la pénalisation de l’organisation de rave-parties a été déposée le 18 mars dernier. « Il est impératif de réaffirmer l’autorité de l’État face aux difficultés et dangers causés par ces rassemblements illégaux […] où l’excès de substances et la perte de contrôle font oublier les véritables raisons de la fête », peut-on lire dans ce texte défendu par une quarantaine de députés de droite et du socle présidentiel.
Les élus pointent aussi le fait que ces rave-parties « facilitent le blanchiment d’argent et l’usage de la soumission chimique, causent des nuisances aux riverains et incitent à la consommation de drogue ». Pire : « d’innombrables viols, blessés et morts y sont à déplorer », assurent-ils. Le texte, porté notamment par la députée Lætitia Saint-Paul (Renaissance), s’attaque tout particulièrement aux organisateurs de ces événements. « La loi n’est pas assez dissuasive, puisqu’elle n’empêche pas la tenue des manifestations », glisse au JDD Mathilde Cohidon-Ramage, assistante parlementaire de l’élue du Maine-et-Loire.
L’importante rave-party de Parnay, ayant réuni quelque 10 000 personnes sur un terrain agricole en mai 2024, a été « l’élément déclencheur » de cette proposition de loi – un homme avait perdu la vie au cours de la fête. Début mars dernier, trois organisateurs ont d’ailleurs été condamnés à des peines allant de neuf à quinze mois de prison avec sursis et à des amendes atteignant jusqu’à 2 000 euros.
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Six mois de prison et 5 000 euros d’amende
Ces peines restent toutefois une exception au vu de la gravité des faits. Les organisateurs de nombreuses rave-parties ne sont en effet condamnés qu’à de faibles contraventions de cinquième classe équivalentes à 1 500 euros. « Il y a un flou juridique sur la notion d’organisateur, étant donné que celui-ci n’est pas toujours identifié. Cela est donc difficile de rendre quelqu’un pénalement responsable », explique Mathilde Cohidon-Ramage. La proposition de loi prévoit ainsi une peine de six mois de prison et jusqu’à 5 000 euros d’amende.
Les députés à l’origine de ce texte tentent de s’inspirer des pays voisins, notamment de l’Italie. Le gouvernement de Giorgia Meloni a en effet créé un délit spécifique permettant d’infliger des peines de prison oscillant entre trois et six ans pour les organisateurs et d’un an à quatre ans de détention pour les participants. « Une amende forfaitaire délictuelle est également prévue ainsi qu’une confiscation du matériel sonore », précisent les élus dans la proposition de loi.
Une nette hausse en quatre ans
En France, le phénomène des rave-parties semble en tout cas avoir pris de l’ampleur ces dernières années. Depuis la crisedu Covid-19, leur nombre a bondi, passant de 330 en 2020 à 550 en 2023 en zone gendarmerie, confirme au JDD le colonel Marie-Laure Pezant, porte-parole de la Gendarmerie nationale. L’année 2024 a toutefois enregistré une légère baisse avec 475 fêtes organisées. Là encore, la fonctionnaire appuie sur le fait qu’une amende de 1 500 euros n’est « pas toujours dissuasive » pour les organisateurs.
D’après elle, le quart Nord-ouest, en particulier la Bretagne, est le « territoire le plus touché » par le phénomène : « Il y en a aussi au niveau du pourtour méditerranéen, dans les Pays de la Loire et un peu au niveau de la zone lyonnaise mais ces fêtes se trouvent essentiellement dans le quart Nord-Ouest. » Marie-Laure Pezant rappelle la différence entre une rave-party, qui peut être autorisée et encadrée par les forces de l’ordre, une « free-party », qui est « totalement clandestine », et enfin un teknival pouvant « durer plusieurs jours ». « On englobe généralement tout sous le même terme de « “rave-party” », constate-t-elle.
La porte-parole de la Gendarmerie nationale déplore d’ailleurs le fait que « de moins de moins » de rave-parties sont déclarées en mairie ou en préfecture : « La recherche d’un monde “underground” où on veut contourner les règles, c’est l’essence de ce genre de rassemblement. »
Des fêtards « hostiles aux forces de l’ordre »
Si la manifestation n’est pas déclarée et illégale, qu’elle créé un trouble à l’ordre public ou des faits délictuels ou criminels, les forces de l’ordre sont amenées à intervenir. Les évacuations peuvent alors tourner à l’affrontement. « Face à nous, on a des gens parfois hostiles aux forces de l’ordre, qui sont dans cette logique de recherche de clandestinité, et qui peuvent être amenés à se rebeller au moment où les gendarmes veulent arrêter la fête », confirme Marie-Laure Pezant. Avant de conclure : « L’objectif de mieux réglementer ces manifestations vise pourtant à protéger les participants eux-mêmes. Toutes ces mesures sont là pour qu’ils puissent faire la fête dans les meilleures conditions ! »
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