Plus d’une nouvelle boutique par semaine. C’est à ce rythme effréné qu’Action veut continuer de déferler sur le pays. Arrivée en 2012, l’entreprise hollandaise emploie désormais 20 000 salariés dans 850 points de vente partout dans l’Hexagone – son premier marché en Europe.
Ce mastodonte du commerce non alimentaire (décoration, bricolage, hygiène, jouets…, on y trouve de tout) a vu son chiffre d’affaires mondial bondir de 20 % en un an pour atteindre les 13,8 milliards d’euros en 2024. Cerise sur le gâteau : début avril, la marque a été désignée enseigne préférée des Français pour la troisième fois consécutive, selon une étude annuelle du cabinet EY-Parthenon.
Ce succès vient entériner une tendance déjà visible depuis plusieurs années : le boom du low cost. Face à l’inflation persistante et aux craintes d’une crise économique mondiale, de plus en plus de consommateurs partent à la chasse aux bonnes affaires, autrefois apanage des classes populaires. « Le pouvoir d’achat reste la préoccupation majeure au sein de la population. La question du prix touche aussi bien la bourgeoise que le bénéficiaire du RSA, analyse le sociologue de la consommation Patrice Duchemin. En bref, le discount est devenu le “new normal” ! »
Un phénomène tendance
Les problèmes de porte-monnaie ne permettent pas, à eux seuls, de comprendre le phénomène. Car à l’heure des réseaux sociaux, fréquenter les boutiques discount, c’est aussi… être tendance. Sur YouTube et autres TikTok, les vidéos type « haul », qui consistent à présenter ses derniers achats à ses abonnés, sont ainsi devenues incontournables. Bien sûr, les influenceurs abusent de la pratique, mais des clients lambda se prêtent également au jeu ! « Il ne faut jamais oublier que la consommation est une source de plaisir et un passe-temps, au même titre que le théâtre, le skate ou la randonnée, insiste Patrice Duchemin. Faire une trouvaille à tarif bradé, ça peut se partager avec les amis, c’est valorisant pour notre image. »
Dans ce contexte ultraconcurrentiel, certaines enseignes « historiques » font grise mine, en témoignent les difficultés de GiFi, qui vient d’annoncer la fermeture de onze magasins en France. A contrario, d’autres, plus jeunes, gagnent en popularité, comme la chaîne irlandaise Primark, devenue une référence dans l’univers de la mode à prix réduit. De nouveaux noms émergent régulièrement, aussi bien dans la capitale, à l’instar de C’est deux euros (le nom parle de lui-même), qu’en province, à l’image de la société belge Wibra (qui a ouvert son premier magasin près de Lille en octobre dernier).
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Une proposition de loi examinée début juin
Dans cette guerre du low cost, les enseignes physiques bataillent avec les colosses de l’e-commerce chinois. Encore inconnues il y a peu, Shein (prêt-à-porter), AliExpress et Temu (généralistes) ont su conquérir le marché français à vitesse grand V grâce à des prix écrasés. Souvent critiqués pour leur qualité bon marché ou leur impact environnemental, ces géants de la vente en ligne, à la communication ciselée, attirent l’attention des responsables politiques.
Une proposition de loi visant à réduire les effets néfastes de la fast fashion (mode éphémère), portée par la députée Horizons Anne-Cécile Violland, sera ainsi examinée au Sénat début juin. « Les discours culpabilisants ne suffisent pas à changer les comportements des consommateurs », juge Patrice Duchemin, qui évoque une récente étude selon laquelle un « essoufflement vert », autrement dit une forme de lassitude face aux injonctions écoresponsables, germe dans l’opinion.
En outre, selon l’expert, si les plus âgés restent attachés aux commerces physiques, la génération Z (personnes nées entre la fin des années 1990 et le début des années 2010) « ne prend plus forcément le temps de se rendre en boutique, d’essayer les vêtements » et préfère, à l’inverse, « commander à tout-va » sur Internet. Lors d’une audition parlementaire en octobre dernier, le PDG de La Poste, Philippe Wahl, livrait en tout cas un constat saisissant : « Shein et Temu représentent 22 % de nos colis en Europe, soit 1 % de plus qu’Amazon ! » Et combien demain ?
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