
Ils sont arrivés avant Javier Milei, pour saluer une dernière fois leur « papa ». Vendredi, veille de l’enterrement du premier pape d’Amérique latine, la communauté des Latinos se réunissait pour el ultimo adios. Sous le soleil de la place Saint-Pierre, entre les fidèles et les curieux venus voir la dépouille du pape, on ne voyait qu’eux, en costumes traditionnels, et on n’entendait que leurs cantiques, incarnations d’une piété populaire si chère à Jorge Mario Bergoglio.
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Pour Ada, jeune mère péruvienne immigrée à Rome, ce pape aura été « leur » pape. Le pape des pauvres, mais aussi des migrants : « Avec lui, notre communauté s’est sentie accueillie, nous sommes réfugiés et il nous a ouvert les bras. » Aux JMJ de Rio, pour son premier voyage international, François invitait l’Église à sortir dans les rues, avant de visiter lui-même une favela. Cette proximité s’exprimait aussi à Rome : pour ses anniversaires, le pape invitait les enfants de migrants à souffler ses bougies chez lui, à la Maison Sainte-Marthe. « Il m’a dit qu’il m’aimait et que Dieu aussi m’aimait », se souvient la petite fille d’Ada, Camilla, qui dès son premier anniversaire avait reçu un abrazo chaleureux du pape. La fête de Notre-Dame de Guadalupe, patronne du Mexique et de toute l’Amérique latine, a elle aussi été mise à l’honneur par le pape argentin qui célébrait, même en période de Covid, une messe à laquelle accourait la communauté latino-américaine, qui regroupe plus de 30 000 personnes à Rome. Là encore, costumes, chants et danses folkloriques réchauffaient les cœurs de ces fidèles loin de leurs pays… « Il nous a toujours considérés comme ses enfants », estime Eveline, originaire du Guatemala.
Dans son pays, l’attachement est parfois plus contrasté
En périphérie de Rome, les Argentins ont leur église. À défaut de l’accueillir, le père Fernando, son recteur, a rencontré à plusieurs reprises un pape qui « avait une vraie connaissance du mal qui existe dans le monde et savait le dénoncer ». François avait « une ligne claire sur la défense de la dignité humaine », rappelle-t-il : le pape a alerté le monde à la fois sur la pauvreté, le trafic d’enfants et l’avortement.
À plus de 11 000 kilomètres de Rome, des milliers de fidèles ont assisté à une messe d’adieu dans la cathédrale de Buenos Aires où l’archevêque a salué « notre cher pape ». Mais dans son pays, l’attachement est parfois plus contrasté. Une partie du peuple argentin a toujours ce pincement au cœur de n’avoir pas eu la chance d’accueillir François lors de son pontificat : « Il a fait tous les pays d’Amérique latine, excepté le Paraguay et son propre pays, il voulait se donner pour les autres au prix même de sacrifier l’Argentine, c’est aussi un beau geste », souligne le recteur de l’église argentine à Rome, avant de concéder qu’« il y a sûrement une raison plus politique ». Depuis l’Argentine, un prêtre confirme : « Le pape a été vu chez nous comme un homme politique plus que religieux », et cite les liens ambigus qu’il a entretenus avec le pouvoir. À Rome, le père Fernando se désole surtout que, pour beaucoup de ses compatriotes, la venue du pape en Argentine n’a finalement même plus été espérée… Une ambivalence à l’image du pontificat de François, donné à todos (tous) comme il invitait l’Église à l’être, parfois au prix de l’incompréhension des siens.
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