
« On alerte depuis 2014, sans avoir l’impression d’être vraiment entendus. » Cet enquêteur spécialisé soupire : désormais, la France connaît une vague de kidnappings et de séquestrations visant des entrepreneurs en cryptomonnaies. Après la dernière tentative d’enlèvement ratée, cette semaine à Paris, en pleine journée, Bruno Retailleau a rassemblé vendredi les grands acteurs du secteur, effrayés par ce déchaînement de violence. « Des mesures spécifiques de protection vont être mises en place. On réfléchit aussi à des solutions pour que les kidnappeurs ne puissent pas effectuer les transferts de fonds aussi facilement », détaille la Place Beauvau auprès du JDD.
Publicité
La suite après cette publicité
Les attaques se multiplient
Le phénomène ne date pas d’hier. Salvador, Colombie, Brésil, Ukraine ou Vietnam, la dernière décennie a vu se multiplier les attaques sur les entrepreneurs en cryptomonnaies au sein de ces pays pionniers. Enlèvements spectaculaires, sédations forcées ou actes de torture, les « crypto whales » – surnom donné aux utilisateurs précoces qui ont fait fortune – sont la cible d’une criminalité en quête de fonds qu’elle imagine anonymes. « Ce qui est faux, rappelle l’enquêteur, puisque les mouvements de cryptos sont aisément retraçables par nos services. »
« Des personnes mal intentionnées repèrent malheureusement les ‘‘influenceurs’’ qui postent des captures d’écran de leur wallet sur Instagram »
Reste que la menace a gagné la France. Selon une récente note du Service d’information, de renseignement et d’analyse stratégique sur la criminalité organisée (Sirasco), consultée par le JDD, l’année 2024 a été marquée par six enlèvements et tentatives d’enlèvement liés aux cryptomonnaies. Six autres faits ont été répertoriés… depuis janvier 2025, soit une augmentation de 100 % en cinq mois. Derrière cette explosion se cache la réalité d’un Hexagone devenu un puissant hub des cryptoactifs : selon l’institut Chainalysis, la France occupe la onzième place mondiale du « taux d’adoption » des cryptomonnaies. « Des personnes mal intentionnées repèrent malheureusement les ‘‘influenceurs’’ qui postent des captures d’écran de leur wallet sur Instagram », explique un gendarme.
Une surveillance accrue
Corrélés à cet engouement, de nombreux événements dédiés aux cryptomonnaies essaiment dans le pays, où investisseurs et professionnels du secteur se rencontrent. « À partir de là, la méthode de l’extorsion classique se met en place. Les criminels choisissent une cible, la prennent en filature puis la kidnappent, que ce soit l’investisseur lui-même ou un de ses proches qui servira de rançon », poursuit le militaire.
D’après nos informations, l’Ethereum Community Conference, le plus grand événement d’Europe sur les cryptomonnaies, qui aura lieu à Cannes au mois de juillet, devrait faire l’objet d’une étroite surveillance par les autorités françaises.
La suite après cette publicité
« On essaye de sécuriser l’enfer mais on aimerait surtout en sortir », a réagi le patron de Paymium Pierre Noizat, l’un des pionniers français de la cryptomonnaie, dont la fille a été victime de la récente tentative d’enlèvement. Interrogé sur BFM, il a largement élargi le sujet : cette « violence […] est quotidienne pour plein de gens en France », dénonçant « le laxisme des pouvoirs publics ». Il a lui aussi utilisé le terme de « mexicanisation », comme Éric Larchevêque, ex-patron de la société Ledger dont l’associé avait été enlevé en janvier dernier. Lui a réclamé, au micro de RTL, le droit de porter des armes de catégorie B pour répondre à l’explosion de la violence en France.
En attendant, Beauvau s’est engagé à mettre en place une « collaboration renforcée avec les forces de sécurité intérieure », ainsi que des séances de formation à la sécurité, encadrées par le Raid et la BRI.
Source : Lire Plus






