Ma femme, atteinte de la maladie de Charcot, est morte dans mes bras en octobre dernier, après avoir lutté plus de cinq années. En ayant toujours refusé le principe même du suicide assisté et de l’euthanasie. Particulièrement sportive (semi-marathon, natation…), avec une hygiène de vie exemplaire, ma femme a été frappée au cœur par cette maladie incurable ! Changement radical de vie alors que nous devions repartir à l’étranger… J’ai réorganisé notre existence autour de ma femme sans l’ombre d’une hésitation. Elle a su faire preuve d’un véritable abandon et d’une confiance absolue envers le personnel soignant.
Avec l’évolution de la maladie, les équipes du service de soins infirmiers à domicile et des auxiliaires de vie de Vivre Adom ont été renforcées par l’hospitalisation à domicile et l’équipe mobile des soins palliatifs pour rester jusqu’au bout à la maison. Cela a été rendu possible aussi grâce à des amis et la famille venant me prêter main-forte. Pour l’aidant familial que j’étais, les charges logistiques ou administratives ne devaient pas prendre le pas sur l’affectif et l’amour conjugal.
Nous avons vécu ces moments avec humour et passion
Elle a refusé l’acharnement. Ma femme ne souhaitait pas de trachéotomie car elle voulait mourir chez elle, alors qu’avec cette trachéo elle aurait été dans un centre, possiblement à 200 km de notre domicile mayennais. Mon épouse a suivi un protocole de soins pour atténuer la douleur, mais elle a voulu garder toute sa lucidité. J’ai eu la chance de la voir mourir apaisée et sereine – aucune crispation ni angoisse, alors que nous étions main dans la main jusqu’à la fin.
Dans mes nombreux échanges avec d’autres personnes atteintes de cette maladie – notamment lors des visites de suivi à Angers –, j’ai constaté que ce n’est pas tant la peur de souffrir que la solitude qui pèse sur les patients atteints par cette horrible maladie. Notre société doit s’entraider. Nous avons un vrai devoir de fraternité, surtout pour les plus faibles, les plus fragiles. Cette solidarité est un vrai réconfort car elle replace le patient au cœur des attentions des autres, sans jugement, sans critique ; c’est juste un devoir d’humanité.
Certes, la dépendance totale est un poids et une épreuve. Mais que de joies partagées… Ma femme, nos enfants, les amis, les soignants ont vécu des moments forts avec humour et passion : « La vie vaut vraiment le coup », me disait-elle. La vie est merveilleuse, mais il y a des hauts et des bas. Il n’est pas possible de légiférer pour les « bas » sans voir qu’il y a des « hauts » à venir ! C’est avoir une vision très sombre de la vie… Oui, nous avons vécu, ma femme et moi, mais aussi la famille et les amis, des moments difficiles, douloureux et parfois de doutes tant cette maladie est terrible. Mais nous avons aussi et surtout vécu – c’est le souvenir que je veux conserver – beaucoup de joie et de bonheur partagé avec nos amis, avec les merveilleuses soignantes et bien sûr avec nos enfants et petits-enfants…
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Ma femme avait très vite perdu l’usage de la parole, de ses mains, et sa mobilité. Mais il y avait alors une vraie complicité dans le regard et les expressions de son visage. Nos petits-enfants ne connaissaient la voix de leur grand-mère qu’à travers la tablette à reconnaissance oculaire : c’était ainsi, c’était leur grand-mère chérie ! Elle a rayonné autour d’elle et montré qu’il fallait espérer malgré tout. Ce n’était pas du masochisme de sa part, ni de la mienne. D’abord, il faut espérer, faire confiance dans la médecine qui, dans 95 % des cas, parvient à soulager les douleurs. Et les progrès dans la recherche médicale sont réels. Ensuite, il faut voir qu’il y a tant de choses à partager, même malade… Et encore plus.
Notre société a un devoir de solidarité envers les plus faibles. C’est trop facile d’ôter des vies en faisant en sorte de « culpabiliser » les plus faibles, les plus fragiles sur le « poids » qu’ils représentent pour les autres ! Ma femme a pu bénéficier des soins palliatifs avec une unité mobile pluridisciplinaire : c’est là qu’il faut concentrer nos efforts pour offrir partout et pour tous – notamment aux plus fragiles et aux plus faibles – des structures de soins palliatifs.
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