
Après avoir ouvert un droit à « l’aide active à mourir » samedi dernier, les députés ont poursuivi : pour qui ? Quand et comment l’accorder ? Qui sera décisionnaire ? Au terme de la bataille sémantique autour de la notion d’« aide active à mourir » qui remplace les termes d’« euthanasie » et de « suicide assisté », c’est l’article 4, qui liste les cinq critères d’éligibilité, qui a occupé quelques heures de débat. Et notamment la notion de phase « avancée ou terminale » que certains députés jugent flou et donc permissive. « Ce critère est plutôt un anti-garde-fou », a estimé le député RN Christophe Bentz qui rappelle, comme plusieurs de ses collègues, que certains patients éligibles pourraient avoir encore des mois, voire des années, à vivre.
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L’idée selon laquelle le patient doit avoir la « capacité à exprimer une volonté libre et éclairée » a été, elle aussi, largement amendée. Sans succès. Personne n’a été écarté par principe de la loi, pas même ceux dont la volonté pourrait être altérée par l’autisme ou la dépression sévère. Des débats révélateurs d’une confrontation permanente entre les tenants d’une primauté absolue de la liberté individuelle – réelle ou non – et ceux qui voudraient à tout prix éviter que certains le réclament pour de mauvaises raisons, qu’elles soient économiques, familiales, sociales, psychologiques… Les premiers ont triomphé : aucun amendement visant à consolider le discernement du patient n’a été adopté. Pas même celui du gouvernement qui voulait s’assurer qu’« en cas de doute sérieux sur le discernement de la personne, le médecin consulte, dans le cadre de la procédure collégiale, un psychiatre ou un neurologue ».
À l’issue, c’est de toute façon le médecin seul qui décide
« Les paroles s’envolent, les écrits restent », a également plaidé le député LR Philippe Juvin pour imposer la nécessité d’une demande écrite du patient. Il a eu beau répéter que cet écrit était obligatoire pour une opération chirurgicale, le texte est resté inchangé : la demande pourra être écrite, mais également faite « par tout autre mode d’expression ». La députée LR Justine Gruet a également proposé, avec ses collègues, qu’un magistrat puisse vérifier le consentement du patient et éviter ainsi tout abus de faiblesse – comme c’est le cas pour le don d’organe. Idée rejetée. « On se lave les mains en laissant les médecins décider », s’est indigné Cyrille Isaac-Sibille, député du groupe Les Démocrates.
Ces députés ont également contesté une décision finale qui n’aurait de « collégiale » que le nom. La procédure prévoit de réunir le médecin référent avec un spécialiste de la pathologie du patient et un « auxiliaire médical » qui peut ne pas connaître le patient ni la situation. Mais à l’issue, c’est de toute façon le médecin seul qui décide. Avec un délai de quarante-huit heures. « Pour une décision aussi grave et irréversible, deux jours, oui, ça nous paraît insensé », a commenté Christophe Bentz.
« Chaque fois que nous essayons de poser des bornes qui nous semblent raisonnables, nous sommes confrontés à des impasses, tel un labyrinthe, a réagi le député socialiste Dominique Potier. Le chemin même que nous avons emprunté de façon ontologique est un mauvais chemin. Chaque fois, nous arrivons à des dilemmes qui sont quasiment insolubles. » Sur ce sujet, Christophe Bentz ne le contredira pas : « Tout au long de ce texte, j’ai cherché à quel moment nous privilégions le soin, j’ai cherché à quel moment la vie pouvait triompher, et je n’ai jamais trouvé. » En attendant le vote global prévu mardi, les débats se poursuivent.
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