L’essentiel
- La victoire du PSG en finale de Ligue des champions a donné lieu à des scènes de liesse mais aussi de violence dans Paris, malgré un important dispositif de sécurité de 5.400 policiers et gendarmes mobilisés.
- Le dimensionnement du dispositif est remis en question par certains, mais les autorités et syndicats policiers le jugent adapté, le préfet de police estimant qu’il n’était « ni une réussite, ni un échec ».
- Mathieu Zagrodzki, chercheur associé au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales, souligne la difficulté de calibrer un tel dispositif face aux rassemblements spontanés et à la « délinquance d’opportunité », tout en rappelant qu’il faut maintenir un équilibre avec les besoins sécuritaires du reste du territoire.
La fête a été un peu gâchée. Au coup de sifflet final, des milliers de supporters parisiens ont envahi les rues de la capitale pour célébrer la première Ligue des champions du PSG, vainqueur de l’Inter Milan (5-0). A cette liesse populaire et spontanée ont succédé les scènes de pillages et les dégradations. Véhicules incendiés, barricades sur le périphérique, vitrines brisées, policiers et sapeurs-pompiers blessés… Au cours du week-end, au moins 570 personnes ont été interpellées à Paris par les forces de l’ordre qui étaient déployées en nombre. Cinq mille quatre cents policiers et gendarmes ont été mobilisés pour l’occasion. Par comparaison, ils n’étaient que 2.000 pour la demi-finale face à Arsenal. Et 2.750, en 2018, lors de la finale de la coupe du Monde remportée par les Bleus.
Mais le dispositif « massif » mis en place, selon les mots du préfet de police, Laurent Nuñez, n’a pas suffi à empêcher les incidents qui ont émaillé ces deux soirées dans la capitale. « C’est un fiasco évidemment », a dénoncé dimanche le vice-président du RN Sébastien Chenu, invité du Grand Jury RTL/Le Figaro/Public Sénat/M6. « Le risque sécuritaire de cette soirée a été manifestement sous-estimé, et le dispositif sous-dimensionné. Paris est livrée aux émeutiers », a accusé sur X le président du parti d’extrême droite, Jordan Bardella.
« C’était déjà un gros service »
Le dispositif mis en place était-il vraiment inadapté ? Non, selon Yvan Assioma, responsable du syndicat Alliance pour l’Ile-de-France. « La finale ne se passait pas en France. Le match ne se jouait pas à Paris, au stade de France, ou au Parc des Princes. Les services de renseignement n’avaient aucune alerte sur des groupes de hooligans ou de supporters ultras qui seraient présents en France. On ne devait qu’encadrer un moment festif. Le dispositif a été dimensionné dans ce sens-là. Et c’était déjà un gros service », explique à 20 Minutes le responsable syndical.
Des effectifs ont été déployés partout dans l’agglomération parisienne : dans Paris, autour des bars du centre, à République, Bastille, et autour des fan zones, notamment celles mises en place en Seine-Saint-Denis. Les commerces se sont barricadés et ont été priés de fermer rideau sur les Champs-Elysées où étaient concentrées la moitié des forces mobilisées. Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a jugé que le dispositif sécuritaire autour du sacre du PSG avait été « à la hauteur », tandis que le préfet de police de Paris a estimé qu’il n’était « ni une réussite, ni un échec ».
« Un contexte potentiel d’impunité »
« C’est toujours difficile de calibrer le dispositif pour un tel événement », explique à 20 Minutes Mathieu Zagrodzki, chercheur associé au Cesdip (Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales). « Il y a deux ou trois points sensibles : les Champs-Elysées, les abords du Parc des Princes, le Trocadéro… On peut y mettre beaucoup d’effectifs et contrôler à peu près la situation. Mais il peut se passer des choses un peu partout dans Paris. Il y a des rassemblements spontanés, des mouvements de personnes qui par définition ne peuvent pas être prévisibles. Il y a les gens qui se rassemblent de manière festive. Et à côté de ça, il y a toujours de la délinquance d’opportunité. C’est un contexte potentiel d’impunité. Il y a énormément de monde dans la rue. Les délinquants ont l’impression de pouvoir commettre des méfaits en bande sans se faire attraper car la police est débordée. »
Fallait-il mobiliser davantage d’effectifs de force de l’ordre ? « Quand on enlève des forces sur une autre partie du territoire, on l’affaiblit un peu en matière de sécurité publique. Et il y a eu des incidents dans d’autres villes de France », insiste Yvan Assioma. « Durant les Jeux olympiques, on a assumé le fait de déplacer des ressources d’autres villes vers Paris. Faut-il faire ce pari-là juste pour une soirée de finale de Coupe d’Europe, sachant que la délinquance du quotidien continue et que d’autres choses se passent ailleurs dans le pays ? Il y a aussi une question d’égalité des territoires », souligne Mathieu Zagrodzki. Et ce spécialiste des questions de sécurité intérieure de conclure : « Paris et le PSG ne peuvent pas tout monopoliser. »




