Comme il existe les rats des villes et les rats des champs, il y a les Républicains de l’Assemblée nationale et ceux du Sénat. Les éoliennes illustrent le clivage qui existe au sein des LR : pour ou contre les énergies renouvelables.
Résumons-nous : le 12 juin Laurent Wauquiez dépose un amendement au Palais Bourbon qui instaure un moratoire sur toute nouvelle installation éolienne et photovoltaïque. Mardi 1er juin au Sénat, les Républicains de la commission des affaires économiques non seulement ne rejettent pas le moratoire mais ils enclenchent, via la loi dite Gremillet, le mouvement inverse. Ils rétablissent les éoliennes sur terre. Ils actent le développement massif du solaire. Ils suppriment la sortie des règles européennes de tarification de l’électricité. Autrement dit, les Républicains du Sénat, contre les avis de Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau, acceptent l’idée que la facture d’électricité des Français s’envole.
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Panique mercredi matin parmi les chefs à plume du parti. Que faire ? Le dossier divise les LR au point que Bruno Retailleau, François-Xavier Bellamy et Julien Aubert publient le soir une tribune dans Le Figaro pour mettre les points sur les i. Il est écrit noir sur blanc que « l’éolien et le photovoltaïque n’apportent au mix énergétique français qu’une intermittence coûteuse à gérer. Il n’y a donc aucune raison de continuer de les financer par des subventions publiques. »
On ne peut être plus clair. Bruno Retailleau est le chef de file des Républicains, sans doute candidat à l’élection présidentielle en 2027. Il dicte son analyse, j’allais dire son programme.
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Le cas Copé
Jeudi matin, Jean-François Copé était l’invité de Sonia Mabrouk sur CNews et Europe 1. On comprend à demi-mots qu’il n’aurait jamais voté le moratoire. Copé a intégré la direction des LR. Il avait soutenu Bruno Retailleau. Il diverge sur le dossier énergie. Il souhaite un mix énergétique qui inclut ces éoliennes toujours plus grandes, toujours plus grosses avec des pales de 60 mètres.
Copé est par ailleurs l’avocat de l’exploitant éolien allemand WindStrom. L’avocat Copé réclame pour son client la condamnation à hauteur de 44 millions d’euros d’un village français, Puyrolland (entre La Rochelle et Angoulême) qui refuse l’implantation d’éoliennes sur son territoire. Le conseil municipal avait donné son accord au début des années 2010 avant de se rebiffer en 2019. Sonia Mabrouk interroge Jean-François Copé sur un possible conflit d’intérêts : « Ce n’est pas le sujet », conclut le maire de Meaux. Ce n’est pas le sujet ? Qu’un maire d’une commune rurale de 200 âmes soit opposé à un autre maire, celui d’une ville de 100 000 habitants, est-ce bien raisonnable ? Qu’il souhaite l’implantation d’éoliennes d’une part et qu’il défende une entreprise qui les installe d’autre part, est-ce encore bien raisonnable ? Jean-François Copé est comme Maître Jacques dans L’Avare de Molière : il change de casquette quand bon lui semble. Homme politique ou avocat, c’est selon. Mais toujours avec les éoliennes.
Récuser l’énergie du vent, c’est lutter contre l’opinion dominante
Le cas Copé est aussi un cas de conscience pour le chef des LR. Bruno Retailleau doit imposer sa ligne. Son autorité en dépend. L’élection présidentielle est programmée dans deux ans. Bruno Retailleau souhaite gouverner la France. Gouverner ses amis devient une exigence. Je ne doute pas qu’il mesure l’enjeu de la séquence : sa crédibilité et son avenir passent par l’allégeance de ses troupes.
Macron fait la morale
La consommation nationale d’électricité baisse en France depuis cinq ans. Rien ne justifie d’investir dans des éoliennes fabriquées en Chine au détriment du nucléaire français.
Les éoliennes défigurent le paysage. Les éoliennes en mer détruisent la biodiversité. Elles ont une capacité maximum de production de moins de 20 % quand le nucléaire avoisine les 90 %. Les sociétés d’exploitation appartiennent à des fonds de pensions américains. Les Français payeront les retraites d’un habitant de Los Angeles ou d’un citoyen de Montréal.
La macronie éructe l’anathème. Elle déteste les contradicteurs
Inutile de rappeler ici comment Lionel Jospin, François Hollande, au nom de l’idéologie, ont massacré une filière d’excellence avec une application qui confine au suicide. Emmanuel Macron a changé d’avis sur le nucléaire comme sur tant de dossiers. Il a ouvert les yeux lorsque la guerre entre la Russie et l’Ukraine a fermé le robinet des importations de gaz. Un plan de relance du nucléaire est en marche. Le président n’oublie pas les énergies renouvelables. Le « en même temps » est son mantra.
La ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher a taclé son collègue Retailleau sur France Info : « C’est irresponsable. C’est du populisme. » Gabriel Attal lui a emboîté le pas sur X, dénonçant « le retour d’une forme de climatoscepticisme antiscience très inquiétant. » La macronie éructe l’anathème. Elle déteste les contradicteurs. Ils sont au choix populistes, complotistes, climatosceptiques, etc. Huit ans que ça dure ! La macronie finissante sermonne le manant. Oserais-je dire que je n’en peux plus de ces petits marquis et marquises, de Trissotin et de Magdelon, de leur cours de maintien et de leur arrogance ? Huit ans qu’ils dirigent ! Et pour quels résultats ! Un zeste de modestie scierait à ces prédicateurs de la morale qui assènent les peurs et convoquent la science.
Une question reste en suspens. Pourquoi de la droite jusqu’à la gauche en passant par le centre existe-t-il ce clivage sur les énergies renouvelables ? Est-ce une question de génération ? Une jeunesse élevée à la crainte de l’apocalypse préfèrerait-elle les sirènes de Greta Thunberg à la pertinence d’Henri Proglio ? C’est possible.
Je crois aussi que l’électricité fabriquée via le vent ou le soleil est devenue un marqueur idéologique. Récuser cette énergie, c’est quitter le cercle de la raison, c’est lutter contre une opinion dominante. Il faut un certain courage pour aller de médias en médias défendre l’énergie nucléaire que le camp du bien a toujours regardée avec défiance. Puissent les LR et Bruno Retailleau ne pas céder aux oukases diverses et variées. Ce mardi au Sénat revient le vote pour le moratoire, cette fois en séance plénière. On saura dans trois jours qui décide chez les Républicains.
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