Voilà trente-cinq ans, Ethan Hunt a prêté serment et rejoint une agence d’espionnage top secrète, employée par le gouvernement américain quand il n’y a plus d’espoir. « Nous vivons et mourons dans l’ombre, pour ceux qui nous sont proches et ceux que nous ne rencontrerons jamais. » Il ne peut alors compter que sur son équipe de professionnels aguerris aux situations de crise extrêmes. Si l’un d’entre eux était capturé ou tué, le département d’État nierait avoir eu connaissance de ses agissements.
En 1996, Tom Cruise catapulte en tête du box-office l’adaptation sur grand écran de la série télévisée Mission : Impossible, née en 1966. Le jackpot pour celui qui a explosé dix ans plus tôt dans Top Gun (1986), de Tony Scott, propulsé instantanément star du cinéma d’action, avec la promesse faite à son public fidèle d’assurer ses cascades très périlleuses lui-même (il est aussi producteur, ça aide). Si l’idée de départ consistait à ce que des réalisateurs chevronnés se relaient aux commandes de la saga (Brian De Palma, John Woo, J.J. Abrams, Brad Bird), son ami et binôme Christopher McQuarrie s’est imposé à partir de 2015, signant à ce jour quatre longs métrages.
Le dernier en date, le huitième, débarque avec fracas le 21 mai dans les salles françaises, après avoir effectué une tournée internationale avec une étape par le Festival de Cannes hors compétition. Il faut bien l’admettre : il s’agit du blockbuster le plus attendu de l’année, qui ouvre la saison estivale. Et il s’avère absolument sensationnel !
« Le monde change, la vérité disparaît et la guerre arrive. » Le ton est donné. The Final Reckoning est la suite directe du septième volet, Dead Reckoning (2023) : on avait laissé Tom Cruise sautant à moto d’une montagne escarpée, pour atterrir en parachute sur le toit de l’Orient-Express lancé à grande vitesse et chutant dans un précipice quelques kilomètres plus loin après l’explosion d’un pont ! Un suspense insoutenable, d’autant que la menace grandit : l’Entité est devenue autonome et, pour dominer la planète, prend le contrôle de tous les arsenaux militaires.
La franchise tend un miroir à notre société contemporaine sur les dangers qui la guettent
Comme c’est le cas à chaque nouvelle aventure, la franchise tend encore un miroir à notre société contemporaine sur les dangers qui la guettent, en l’occurrence l’hypothèse d’une apocalypse nucléaire suite à la prise de pouvoir d’une intelligence artificielle infectant tout le cyberespace, qui rappelle forcément les œuvres de Skynet dans Terminator 2 (1991), de James Cameron. La paranoïa et le chaos gagnent du terrain, la population ne sait plus qui croire et semble au bord du gouffre. Un seul homme peut éviter l’extinction de l’humanité : Ethan Hunt qui doit, pour y parvenir, s’emparer du code source de l’Entité et la mettre hors d’état de nuire. Problème, il se trouve dans un sous-marin coulé sous la banquise, à 150 mètres de profondeur. Vous l’aurez compris : que ce soit sous l’eau ou dans les airs (agrippé à l’aile d’un avion en plein vol, affrontant des vents de plus de 190 km/h et à 3000 mètres d’altitude), l’acteur américain ne démérite pas, imposant toujours un niveau d’excellence et d’exigence rarement atteint au cinéma.
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Car on le répète : l’effet spécial, c’est lui ! Combats au corps à corps ou à l’arme blanche, fusillades, courses-poursuites, cascades qui défient sans arrêt les lois de la pesanteur : le spectacle est total, à la fois vertigineux, généreux, trépidant et jubilatoire. Tom Cruise repousse ses limites pour nous divertir, et on en redemande. Décrochage de mâchoire garanti quand on le voit en combinaison de plongée nager dans un conteneur de torpilles et tenter d’éviter celles qui lui tombent dessus. Ou tout simplement quand il pique un sprint ! Des morceaux de bravoure sidérants qui préservent la réputation de Mission : Impossible, avec une connexion émotionnelle supplémentaire avec ce héros hanté par son passé traumatique et pour qui la vie de l’autre compte plus que la sienne. Il y a cette fois clairement une dimension messianique dans cette figure sacrificielle, qui rachète les péchés de ses concitoyens et promeut des valeurs comme la gentillesse, la confiance et la compréhension mutuelle. L’élu accomplit son destin pour éviter le Jugement Dernier et sillonne le globe (Autriche, Afrique du Sud, mer de Béring) dans ce récit empreint de nostalgie et très impressionnant, où on retient son souffle, en immersion complète. D’ailleurs, à plusieurs reprises, la bande son relaie nos battements cardiaques, pour exacerber la tension.
Si The Final Reckoning a été annoncé comme la fin d’un cycle, il ne s’agit pas fort heureusement d’un chant du cygne : le dénouement, ouvert, laisse entrevoir toutes les possibilités, dont celle d’un retour d’Ethan Hunt et de sa bande. À 62 ans, le comédien, même s’il aurait déjà soumis un nom pour éventuellement lui succéder (Glen Powell, son partenaire dans Top Gun : Maverick (2022), de Joseph Kosinski), possède un solide avantage : personne aujourd’hui ne lui arrive à la cheville dans ce domaine, tant sa préparation physique est intense et son engagement absolu, et les risques qu’il prend à l’écran sont colossaux. D’ailleurs, Christopher McQuarrie n’a-t-il pas déclaré qu’il lui devait ses cheveux blancs ? Pas sûr que Tom Cruise renonce de sitôt à un énième shoot d’adrénaline.
Mission : Impossible – The Final Reckoning ★★★★, de Christopher McQuarrie, avec Tom Cruise, Simon Pegg, Hayley Atwell, Ving Rhames. 2h51. Hors compétition. Sortie le 21 mai.
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